Les agrumes
Du citron familier à l’originale main de Boudha
Suivez les conseils de nos grands chefs Frédéric Vardon et Mickaël Féval pour transformer l’hiver en grandes vacances gustatives et faire valser vos papilles
Quel que soit l’agrume, on utilise ses zestes. Mais pour pour éviter « la mauvaise amertume », Frédéric Vardon, chef du 39V à Paris, nous confie quelques astuces.
«Choisissez de préférence des fruits non traités, sinon bien les laver. Enlevez le ziste ( la peau blanche à ne pas confondre avec le zeste ) et blanchissez 3 fois le zeste en démarrant à l’eau froide. Ce dernier point est très important car si vous le jetez dans l’eau chaude, le choc thermique fermera les pores et bloquera l’amertume dans la peau.»
« Les agrumes, je les aime de l’entrée au dessert : sur un carpaccio de poisson ou un tartare, mais je déglace quasiment toujours mes jus de viande ou de volaille avec un jus de citron ou de pamplemousse. Cela casse le côté « gras » et apporte de la légèreté à la sauce. Et j’adore mettre des zestes de citron dans un gigot d’agneau ; il amène une touche de cuisine du Sud qui réveille votre plat. C’est l’idée aussi de ma recette d’agneau de lait aux agrumes, où citron, pamplemousse et kumquat apportent une bonne amertume.»
Le chef Mickaël Féval, grand spécialiste de la cuisine du poisson, affectionne particulièrement les agrumes pour les accompagner.
Nous l’avons suivi à Rungis, où Alain Cohen, des Vergers Saint Eustache, lui présente les dernières nouveautés de Michel Bachès, pépiniériste du sud ouest et un des principaux fournisseurs en agrumes « rares » des grands chefs.
Vous y verrez différentes variétés de citron caviar, ce fruit aux petites billes croquantes, dont l’apparence fait penser au caviar, qui explosent en bouche. Mickael Féval utilise leur goût acidulé pour amener du peps à son Tartare de Saint Pierre de Quiberon. Quant à Jean-Louis Nomicos, chef des Tablettes à Paris, il en a fait la base d’un de ses plats signatures, le ris de veau au citron caviar.
A découvrir aussi le yuzu, qui ressemble à un petit pamplemousse. Originaire d'Asie, son goût très particulier se situe entre le citron vert et le pamplemousse. Plein de pépins mais juteux, le yuzu se râpe et se presse. Les zestes condimentent joliment viandes blanches et poissons. Le jus donne des ailes exotiques à vos vinaigrettes et marinades. On le trouve aujourd’hui facilement sous forme de jus dans les épiceries japonaises et il garde sa fraîcheur orientale des mois dans la porte du frigo.
Frédéric Vardon m’explique que les cuisiniers japonais en mettent toujours un trait dans un bol avant de verser le consommé de bœuf ou de volaille.
Il est aussi très apprécié en pâtisserie car il apporte une saveur acidulée sans trop d’acidité. Essayez le dans un soufflé vous allez envoler vos papilles.
Quant au combawa, ce pilier de la cuisine thaï, ressemble à un gros citron vert à la peau fripée. Son parfum subtil évoque celui de la citronnelle et les chefs en aromatisent volontiers un bouillon. Ses feuilles, appelées feuilles de lime, follement parfumées, s’infusent voluptueusement dans les currys et autres mijotés. William Ledeuil, chef de Ze Kitchen Gallerie, en fait une huile parfumée en les faisant infuser dans une huile d’olive agrémentée de graines de vanille. Votre filet de poisson vapeur aura tout de suite une autre saveur !
Le cédrat fut le premier agrume à fleurir en Asie, puis en Europe. Comme souvent les patriarches, ce n’est pas un rigolo: résolument amer, plein de pépins, absolument pas juteux. Les pâtissiers utilisent ses zestes confits; les cuisiniers corses le râpent dans les marinades de chasse ou dans les papillotes de poissons gras. Il faut surtout essayer l’un de ses proches cousins, la «main de bouddha» sortie tout droit d’un manga. Frédéric Vardon, l’adore car il n’a pas d’amertume, comme ces gros citrons que l’on trouve dans le sud de la France ou de l’Italie.
Alors en zeste ou en jus, sucré ou salé, abusez-en c’est la saison !
Sophie le Menestrel
Terroirs de Chefs