Et le beurre cuit?
Bon pour la santé ?
Imaginez que vous puissiez savourer ce délice au gout de noisette sans remord ni inquiétude pour la santé…
En tout cas c’est cette question qui nous rassemble ce matin à l’atelier Guy Martin rue de Miromesnil à Paris.
Nous avons été conviés par la fédération des produits laitiers qui souhaite rectifier quelques fausses idées reçues, véhiculées par les médias, et qui tendraient à faire croire que cuisiner du beurre est mauvais pour la santé
Que nenni ! Nous explique Frédéric Tessier, enseignant chercheur spécialiste en nutrition et expert de la célèbre réaction de Maillard.
C’est koa ? me direz vous. Mais si, vous la connaissez cette réaction, vous la réalisez tous les jours dans votre cuisine. Vous êtes comme Mr Jourdain, vous faites de la chimie sans le savoir. C’est la réaction de brunissement des aliments que l’on observe à partir d’un certain de temps de cuisson.
Cet ingénieur a donc étudié cette réaction pour le beurre et les molécules que l’on retrouve systématiquement en cas de problème de santé et a pris les deux les plus nocives, le CML et le HMF. Après observation, les deux s’avèrent beaucoup plus présentes dans des céréales transformées ou de la poudre de cacao que dans du beurre chauffé.
Mais pourquoi cette diabolisation du beurre ?
On a cherché dans les années 80 à diminuer le nombre d’accidents cardio-vasculaires et on a visé les lipides dans un premier temps comme facteur aggravant. En fait, on s’aperçoit aujourd’hui que les sucres s’avèrent bien plus nocifs pour la santé.
On a aussi privilégié l’huile d’olive. Or, c’est un phénomène très récent comme nous l’explique Patrick Chambon, historien de la matière grasse à la Sorbonne. Il a étudié l’évolution des pourcentages de matières grasses présents dans les recettes des livres de cuisine. « Depuis la Renaissance, le pourcentage de matières grasses d’origine animale n’avaient fait que croitre car elles étaient censées indiquer la richesse de son consommateur. »
Ce n’est que depuis le début des années 80 et l’avènement de la nouvelle cuisine avec en chef de file, Michel Guérard et sa « cuisine minceur », que l’on a démarré une véritable chasse à la sorcière du beurre et de cette crème longtemps portés au pinacle par les gastronomes.
« En fait, le beurre doit savoir être cuisiné. » nous explique Tugdual Debethune, chef expert du Centre Culinaire de France et l’un des grands spécialistes de la cuisine au beurre. « L’erreur principale consiste à trop le chauffer. Une raie au beurre noir par exemple est une véritable hérésie culinaire. La vraie recette c’est un beurre noisette dans lequel on ajoute un acide pour déglacer les sucs de cuisson. »
« Premier indice : le bruit ! Tant que le beurre crépite il n’est pas trop chaud car ce sont les molécules d’eau présentes qui en s’évaporant font ce grésillement.
Deuxième indice : le nez. Tant qu’il reste à 120-125° le beurre dégage une agréable odeur de noisette.
Pour baisser la température et éviter que le beurre brule, il suffit de rajouter un liquide à base d’eau qu’il s’agisse d’un bouillon, de vin ou de cidre.
Mais le beurre est surtout un formidable outil culinaire. Il apporte onctuosité et brillance à une sauce, fixe le gout et les aromes, colore et apporte croustillance aux aliments et exalte les goûts. Et, pour finir, il est indispensable aux pâtissiers qui sans lui ne pourraient réaliser Paris-Brest, Saint Honoré et toutes les pates feuilletées. »
Donc plus de culpabilité car le beurre contient moins de calories que l’huile et sa forte teneur en vitamine A en fait l’allié incontestable des jolies peaux !
Sophie le Menestrel
Terroirs de Chefs